J’avais dix ans, j’avais des ailes
J’étais follement amoureux d’elle
J’donnais mes billes et mes calots
J’suais pour deux en pédalo
Avec son an de plus que moi
Elle avait un p’tit je n’sais quoi
Qui faisait mouche à chaque fois
Qui déjà me laissait sans voix !
Un jour très fier innocemment
J’lui présente un copain plus grand
À peine éclose et déjà femme
Elle m’offrit mon premier grand drame
Dès que l’amour entra en lice
J’étais comme le perdant d’office
Elle me faisait des plans d’actrice
Moi il me manquait la malice… la malice…
Quand mes copains faisaient l’troufion
Moi j’échappe à la conscription
En suis-je devenu plus couillon ?
Moi qui n’sais faire que des chansons
Et v’là mon nom sur les frontons
Des music-halls de la région
V’là qu’on s’bouscule au portillon
Qu’on s’arrache mon microsillon
Aller savoir à quoi ça tient
La gloire qui comme une fille s’en vient
Dans son lit royal tu te vautres
Et la v’là dans les bras d’un autre
Tous les flatteurs même la police
Me proposaient leurs bons offices
J’disais merci à tout venant
J’donnais la main le cœur dedans
Sans malice… sans malice…
Certains diront qu’j’me la coule douce
Que j’prends mon blé là où ça pousse
J’vous d’mande pas d’pleurer sur mon sort
Mais mon rêve j’le paie au prix fort
C’est vrai… j’fais la vie buissonnière
J’suis même pas l’père réglementaire
J’ai des enfants qui ont mes yeux
Mais Dieu j’espère vraiment pour eux…
Qu’ils verront les choses en plus net
Ou qu’ils s’trouveront de bonnes lunettes
Moi c’est trop tard on m’chang’ra plus
J’vais pas pleurer sur ce qui fut
Oui j’en ai eu des grands moments
Au-delà de mes rêves d’enfant
Et si la vie m’demande un bis…
J’repartirai comme un novice
Sans malice… sans malice
Sans malice… sans malice
Sans malice… sans malice